La stratégie de la Boîte Noire : ou comment faire de nos erreurs des opportunités de progrès
Ce titre, la Stratégie de la Boite Noire est inspiré des boîtes noires des avions (même si dans les faits elles sont oranges.)
Cet ouvrage est remarquable. Malheureusement, il donne aussi à réfléchir sur les débats actuels autour des vaccins. Ce n’est pas du tout l’objet du livre, mais ses conclusions sont quand mêmes assez alarmantes si on les met en perspectives de notre actualité de la santé.
De quoi s’agit-il ?
En résumé, ce livre traite de la façon dont nous traitons les erreurs. Il distingue deux types de traitements :
- En boucle ouverte, quand l’objectif est de capitaliser rapidement et le plus possible sur les erreurs constatées
- En boucle fermée, quand l’objectif est de mettre les erreurs sous le tapis, les minimiser, voire les nier catégoriquement, quelles que soient les conséquences.
Le secteur champion des boucles ouvertes est l’aéronautique. Les formidables progrès de ce secteur viennent de l’analyse approfondie et systématique, non seulement des erreurs, mais aussi des incidents. Les erreurs ne sont pas stigmatisées, elles sont considérées comme des opportunités d’apprentissage. Si un incident est transmis dans les 10jours qui l’ont suivi, les pilotes n’ont rien à craindre. Les rapports sont rendus anonymes.
Le plus mauvais élève et donc champion des boucles fermées est le secteur de la santé. Les chiffres cités sur le nombre d’erreurs médicales sont énormes, colossaux. Selon l’auteur, c’est la 3ème cause de décès aux Etats Unis (après les maladies cardiovasculaires et le cancer.) 14% des patients en soins intensifs sont tués par une erreur médicale ou une défaillance…Ce chiffre est en grande partie dû à l’absence de système d’apprentissage à tirer à chaque erreur. Tout le contraire de l’aéronautique.
Rien que pour l’analyse de ces deux secteurs au regard de leurs traitements respectifs des erreurs, ce livre vaut le coup d’être lu.
Mais il ne s’arrête pas là. Il traite aussi du sujet de la justice qui ne brille pas vraiment parmi les champions des boucles ouvertes… Les erreurs judiciaires sont également très nombreuses.
Enfin, l’auteur explique brillamment la force de la dissonance cognitive. Pour tout vous dire, ce n’est pas un sujet nouveau pour moi, j’en parlais déjà dans mon premier livre, « Vendre aux clients difficiles« , paru en 1997. Je m’étais déjà intéressé au sujet, mais je n’avais saisi a quel point les ravages de la dissonance cognitive peuvent être importants et surtout durables. L’auteur cite une multitude d’exemples de personnes (que ce soit dans le domaine judiciaire ou de la santé) qui ne changent pas d’avis, qui n’acceptent pas de s’être trompé, malgré toutes les preuves qu’on puisse leur présenter.
Vive les ECR : les tests Essais Contrôlés Randomisés
Enfin, l’auteur fait un véritable plaidoyer pour les ECR (les tests Essais Contrôlés Randomisés). Notre intuition est souvent fausse quand il s’agit d’évaluer les chances de succès d’une innovation, d’un nouveau produit, d’une nouvelle technologie. Pour l’auteur, « l’essai randomisé contrôlé est l’une des inventions majeures de la science moderne». L’auteur précise quand même, qu’il y a aussi des limites comme le prouvent les trucages régulièrement dénoncés à propos de tests de l’industrie pharma qui n’hésite pas à arranger les choses quand les résultats ne lui conviennent pas…
Mais quand ils ne sont pas truqués, ces tests ECR sont faciles à mener et permettent d’éviter les fausses bonnes idées.
Enfin, pour finir cette fiche de lecture, voici un copier-coller d’un passage qui fait un peu froid dans le dos :
Nous supposons souvent que les personnes intelligentes sont celles qui ont le plus de chances d’émettre des jugements solides. Nous voyons l’intelligence, quelle qu’en soit la définition, comme la meilleure façon de parvenir à la vérité. Pourtant, en réalité, l’intelligence est souvent déployée au service de la réduction de la dissonance. En effet, les penseurs les plus prestigieux sont parfois les plus fervents adeptes des techniques de reformulation, souvent de façon si subtile que c’est difficile pour nous, pour eux ou pour quiconque de le remarquer.
Bon, je m’arrête là, mais je dois vous dire que ma fiche de synthèse près fait près de 8000 mots… Je vous assure que ce livre est une pépite !
Si vous voulez comprendre les meilleurs font pour capitaliser sur leurs erreurs, lisez La Stratégie de la Boite Noire
Bonne lecture à tous !
