sommaire
Préambule
En toute logique, plus les commerciaux ont d’ancienneté dans le poste…
- plus ils devraient être performants pour gagner de nouveaux clients,
- plus ils devraient aimer la prospection,
- plus ils devraient avoir envie d’exploiter leur expérience et leur savoir-faire dans cette activité de conquête commerciale qui est la quintessence du métier.
Et pourtant, il suffit d’avoir exercé des responsabilités de management commercial pour savoir que cette « logique » est rarement acceptée. Au contraire, la prospection est très souvent considérée comme une forme de purgatoire, de bizutage réservé aux « p’tis jeunes ».
Les plus anciens, quant à eux revendiquent leur statut « d’éleveurs » voire de Key Account Manager ce qui est plus chic… Le pire, c’est qu’ils n’ont souvent aucun mal à convaincre leur hiérarchie qu’ils ont gagné avec le temps, le droit de s’affranchir de cette basse besogne qui consiste à ouvrir de nouvelles sources de business.
Bref, on marche sur la tête.
Alors, si vous êtes manager commercial et que vous êtes à la tête d’une équipe suffisamment conséquente pour avoir plusieurs profils, je vous propose cette grille de lecture ainsi que quelques suggestions de messages et de conseils à faire passer auprès de chaque « famille » de commerciaux.
Je vais passer en revue une à une chacune de ces catégories.
Mais avant, je tiens à préciser une chose. L’âge des artères ne compte pas dans mes propos.
Vous pouvez avoir des débutants de 50 ans, qui prennent un job de commercial pour relancer leur carrière et qui ont de l’énergie à revendre et dans le même temps des jeunes qui paraissent déjà attendre la retraite. Et inversement évidement.
Aucune généralisation abusive dans mes propos. Ancienneté est ici synonyme d’expérience dans le poste.
Famille des « Très motivés, c’est bien, mais restons calmes » !
Commençons par les « fous furieux »…
Je pense à ces débutants, qui ont compris l’intérêt de la prospection de nouveaux client et qui veulent s’y mettre immédiatement. Je sais, je sais, vous aimeriez en avoir plus des comme ça. Je vous le souhaite. Mais attention, je vous souhaite aussi de ne pas les griller trop vite.
Je vais vous donner un exemple:
Si ma fille me dit qu’elle veut se mettre au parachutisme, je ne vais peut-être pas sauter de joie, mais bon, je ne vais pas essayer de la convaincre du contraire. J’imagine qu’elle va suivre une formation, que les choses vont se faire progressivement et qu’elle sautera en chute libre quand et seulement quand elle sera prête. Maintenant, imaginons qu’elle me dise : Demain je fais mon premier saut en parachute. C’est génial, hier j’ai suivi une vidéo sur YouTube et avec ça, c’est bon, je peux sauter en solo direct. À votre avis, quelle va être ma réaction ? Vais-je être très serein ? Vais-je la laisser faire ça ou est-ce que je l’attache en attendant que ça passe…
Bref, vous voyez où je veux en venir.
Eh bien sur le terrain commercial, c’est un peu la même chose. Certes, un vendeur débutant qui s’enflamme ne prend pas le risque de se transformer en flaque de ketchup, mais il peut quand même s’écraser lamentablement sur le mur du scepticisme de son prospect. Et ceci n’est ni bon pour son égo, ni pour votre chiffre d’affaires, ni pour l’image de votre entreprise.
Moralité, avec cette famille : félicitez et tempérez !
- Félicitez-les et reconnaissez leur enthousiasme pour la prospection de nouveaux clients comme une qualité hautement appréciée. Ceci doit être sincère et parfaitement entendu.
- Rappelez les choses à maîtriser pour qu’ils puissent faire une bonne impression auprès des prospects.
- Planifiez les étapes à suivre et à respecter entre le moment présent et les premiers rendez-vous prospects en autonomie.
- Expliquez-leur que votre démarche n’est pas de les brimer, mais que vous souhaitez ainsi les aider à capitaliser rapidement sur des premières réussites.
Erreur à éviter :
En faire trop !
Si je vous propose de tempérer légèrement leur ardeur, je ne vous suggère pas pour autant de les enfermer en formation pendant 12 ans. Mon conseil est juste de faire en sorte qu’ils soient vraiment prêts et de valider par vous-même, que vous êtes à l’aise avec l’image qu’ils vont porter auprès de vos prospects.
Famille des « Pas motivés mais c’est normal » !
Voyons maintenant les débutants moins téméraires. Ils savaient avant d’accepter le poste qu’il y avait de la prospection, mais bon vous sentez comme une pointe de réticence.
Avant de crier au scandale et de les convoquer pour un recadrage en bonne et due forme, dites-vous que leur réticence est peut-être normale.
Eh oui, si vous ne savez pas nager et que je vous propose de faire une course sur 100 mètres nage libre, quelle que soit la récompense promise au vainqueur vous ne serez sans doute pas très motivé. Et même si je vous dis qu’en arrivant dernier, vous recevrez quand même un prix, rien n’y fera. Personne n’arrivera à vous convaincre de vous jeter à l’eau.
Eh bien, dites-vous que pour la prospection, pour partir à la conquête de nouveaux clients, c’est un peu la même chose. La perspective de conduire un premier rendez-vous face à un prospect qui jusque-là, se passait très bien de vos services, n’est pas la chose la plus enthousiasmante qui soit pour un commercial qui ne sait pas comment s’y prendre.
D’ailleurs, c’est pour cela que pendant des années, lorsque je faisais encore de la formation commerciale, je commençais toujours par renforcer les compétences nécessaires pour conduire un premier entretien de prospection, AVANT d’aborder les techniques de prise de rendez-vous.
Mon raisonnement était le suivant : pour obtenir un rendez-vous, il faut être motivé et cette motivation est d’autant plus forte lorsqu’on n’appréhende pas l’étape suivante…
Moralité, avec cette famille : soyez patient !
- Acceptez et comprenez les réticences initiales.
- Prenez le temps de transmettre les clés, tant sur le plan de la maîtrise technique de l’offre que sur la démarche commerciale en prospection.
- Précisez les travaux personnels à mener pour gagner en confiance rapidement.
- Planifiez les étapes à suivre et à respecter entre le moment présent et les premiers rendez-vous prospect en autonomie.
Erreur à éviter :
Être trop patient !
Évidemment, les conseils précédents nécessitent un temps proportionnel à la complexité de votre métier. Mais attention de ne pas tomber non plus dans l’excès inverse. Si vous découvrez que la réticence vis-à-vis de la prospection persiste, si certains vous disent, même après vos efforts d’accompagnement, qu’ils « n’aiment pas la prospection », alors le meilleur service à leur rendre est de les inciter à choisir une autre voie. Et le plus vite sera le mieux.
Famille des « Pas motivés et ce n’est PAS normal » !
Alors là, nous allons aborder les cas les plus délicats…
Il s’agit des gens les plus expérimentés mais qui ont décidé que la prospection n’était pas assez noble pour eux. Ceux sont ceux qui se comportent comme des « barons » à la tête de leur « cheptel » et qui n’envisagent plus de redescendre d’un cran pour retourner à la chasse aux nouveaux clients.
Évidemment, je force un peu le trait, mais à peine.
Et en fait, contrairement à ce que vous pourriez croire, je ne leur en veux pas. Je les comprends parfaitement. Bien souvent, ces croyances vis-à-vis de la prospection ne viennent pas toutes seules. Si cet état d’esprit existe, c’est qu’on l’a laissé se développer.
Je ne pense pas que ceci puisse arriver dans une entreprise qui valorise vraiment les gens qui conquièrent de nouvelles références, qui ouvrent de nouvelles portes, qui permettent à l’entreprise de se développer.
Malheureusement, c’est assez rare.
Pire encore, il est assez fréquent, pour ne pas dire systématique, que la réussite d’un commercial soit reconnue par une promotion à un poste de manager. C’est encore la norme. Quel est alors le message pour un commercial ancien qui n’est pas manager ? Que lui dit-on ?
Bref, il y a plein de raisons qui peuvent pousser un « ancien » à se lasser de ne pas être reconnu et de considérer la prospection comme la confirmation de son statut de commercial senior non-manager…
Quel dommage !
Quel dommage parce que la prospection est la quintessence de l’activité commerciale. C’est dans la prospection que l’expertise, que les années d’expérience, que la maturité professionnelle peuvent être le mieux exploités.
Moralité, avec cette famille : soyez bienveillant !
Je ne sais pas si bienveillant est le bon terme mais c’est celui qui me semble être le plus proche des idées et suggestions suivantes :
- Ne vous braquez pas, faites preuve d’empathie et reconnaissez leur expertise. Le manque de reconnaissance est un mal qui fait plus de dégâts qu’on ne le pense.
- Rappelez encore et encore votre haute considération pour la prospection de nouveaux clients et son importance pour le développement de votre équipe et/ou de votre entreprise.
- Faites le lien entre l’expérience de vos collaborateurs et leur capacité à prospecter avec succès. Rappelez qu’ils sont les mieux placés pour séduire les prospects les plus attractifs et donc les plus courtisés.
- Militez en interne pour que la prospection soit reconnue à sa juste valeur et que le package de rémunération soit adapté en conséquence. Pardon de préciser cette évidence mais si gérer « ses » clients rémunère autant que d’ouvrir de nouveaux comptes, il ne faut pas s’étonner que la prospection soit mal considérée.
- Casser la règle de la progression systématique vers un poste de manager. C’est un peu comme si un excellent chirurgien devait absolument devenir directeur de clinique pour progresser. Heureusement que ce n’est pas le cas et que nous avons encore des chirurgiens qui progressent dans l’exercice de leur art tout au long de leur carrière.
Erreur à éviter :
Oublier l’évidence !
Oublier que les clients sont d’abord les clients de l’entreprise. Il arrive parfois que d’anciens commerciaux considèrent que les clients dont ils s’occupent sont les leurs. Ceci renforce alors quelques attitudes « conservatrices » qu’il est bon de circonscrire rapidement. Si vous avez le sentiment d’avoir fait le nécessaire pour que la prospection soit reconnue à sa juste valeur, mais que les plus anciens affirme que « gérer » leur portefeuille, les empêche de prospecter, alors remaniez les portefeuilles. Si gagner de nouveaux clients est important pour votre entreprise, alors aucune excuse vis-à-vis de la conquête de nouveaux clients ne doit être tolérée, quelle que soit l’ancienneté.
Famille des « Motivés et c’est TOP » !
Enfin, concentrons-nous sur la crème de la crème, les héros de la vente, ceux qui aiment et savourent, années après années, les joies de la prospection.
Ce sont les meilleurs commerciaux possibles qui cumulent l’expérience tout en conservant l’envie et l’œil qui brille.
Bref, ceux sont vos perles rares !
Moralité, avec cette famille : soyez exigeant !
- Soyez exigeant en leur fixant des objectifs plus ambitieux que les autres. Ne les laissez pas stagner. Fixez-leur des objectifs de résultats et de progrès à la hauteur de leurs capacités et ambitions. Eh oui, c’est un peu contre intuitif, mais ne prenez pas le risque de les perdre en les manageant comme les autres. Le pire qui puisse vous arriver est qu’ils s’ennuient, se lassent ou constatent que vous ne les faites plus progresser.
- Soyez exigeant avec vous-même. Votre réflexe naturel en tant que manager « bienveillant » est sans doute de consacrer davantage de temps de coaching aux commerciaux les moins performants. Attention à ne pas négliger les meilleurs pour autant. Il faut oser challenger les meilleurs et ceci n’est pas toujours le plus facile pour un manager.
- Soyez exigeant avec votre hiérarchie. Je sais que les règles sont les règles et que vous aurez souvent du mal à lutter avec les RH ou la direction financière pour faire des exceptions dans les politiques de rémunération ou les primes exceptionnelles… A vous de lutter pour rappeler que malheureusement, les règles nivellent plus souvent vers le bas qu’elles ne permettent de retenir les meilleurs.
Erreur à éviter :
Les transformer en stars !
Bien sûr vous les appréciez ! Bien sûr vous voulez les conserver ! Bien sûr vous aimeriez en avoir plus comme ça ! Mais attention à ne pas en faire trop avec eux et leur faire perdre le sens des réalités. C’est pour cela que vous devez les challenger en permanence pour leur donner des objectifs à la hauteur de leur motivation sans jamais les laisser s’endormir sur leur lauriers…
En résumé…
La prospection de nouveaux clients est la quintessence de l’activité commerciale.
Bien sûr, certains d’entre vous me diront que leur entreprise croule déjà sous les clients à gérer et que la prospection n’est pas si importante. Si c’est le cas, si c’est vraiment le cas, je me demande bien pourquoi vous êtes encore en train de lire ces lignes.
Pour les autres, pour ceux qui pensent comme moi que la capacité à convaincre de nouveaux clients est la qualité première d’un commercial, alors j’espère que ces quelques lignes vous aideront à vous concentrer sur l’essentiel.
- Soignez vos purs-sangs en étant exigeant avec eux, avec vous-même et avec votre hiérarchie afin de tout faire pour les stimuler et les conserver.
- Faites en sorte de redonner du sens aux gens d’expérience qui peuvent tant apporter sur le plan de la prospection de nouveaux clients.
- Ne grillez pas vos futurs purs sangs par un excès de précipitation
- Rassurez les moins téméraires.
Et surtout, ne tolérez plus jamais que quelqu’un qui se revendique commercial vous dise : « moi, je n’aime pas la prospection ! ». C’est un peu comme si un comptable vous disait, « moi je n’aime pas faire les bilans… ». Ça pose problème.
Allez, bon business à tous !
© Copyright : Lève-toi et vends ! / Nicolas Caron
Ps : Vous trouverez aussi d’autres suggestions à propos du coaching des commerciaux dans cet autre article.
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Pour aller plus loin sur le sujet de l’efficacité commerciale, mes conférences et mes livres vous attendent…
Bonne prospection à tous.