Engagement professionnel : avez-vous vraiment besoin d’un Chief Happiness Officer ?

Pas d’engagement professionnel sans implication personnelle

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Depuis que l’institut Gallup réalise sa célèbre étude, la thématique de l’engagement professionnel des salariés est une forme de marronnier.

Tous les ans, nombre d’articles reviennent sur les chiffres de cette étude qui illustrent le « désengagement » croissant des salariés vis-à-vis de leur travail, de leur entreprise ou des deux en même temps. Et c’est vrai qu’il y a de quoi dire comme en témoigne la dernière édition qui évalue à 14% la proportion des salariés dits « engagés » en Europe.

salaries engages et desengages dans l'entreprise
Selon Gallup, seulement 14% des salariés en Europe seraient engagés…

L’engagement professionnel : une question de management ?

Même si j’ai tendance à me méfier des études publiées par des organismes qui vendent leurs services pour régler les problèmes qu’ils soulignent, il faut bien admettre que ce sujet est aussi difficile à appréhender qu’alarmant. 

Alors évidemment, une foule « d’experts en management » prodiguent année après année, pour ne pas dire de façon continue, une multitude de conseils pour transformer comme par magie, des salariés « désengagés » en salariés engagés.

Et c’est ainsi que fleurissent les recommandations faites aux dirigeants et aux managers de proximité pour améliorer le bien-être de leurs collaborateurs, y compris de leurs commerciaux surtout s’ils sont bons, afin de les séduire et de les retenir.

Voici en quelques mots, les principales recommandations que tout manager digne de ce nom devrait maintenant intégrer dans sa feuille d’objectifs, afin de préserver l’engagement professionnel de ses salariés :

  • Respect absolu de l’équilibre vie pro / vie perso.
  • Déclinaison au sein de chaque équipe des accords sur la QVT.
  • Mise en place de la semaine de 4 jours et/ou d’une large proportion de télétravail.
  • Écoute attentive et prise en compte des émotions de ses collaborateurs.
  • Donner du sens et pratiquer l’empathie pour lutter contre le « quiet quitting ».
  • Exercice quotidien du « care management », ce terme importé du monde médical et qui entre petit à petit dans le monde de l’entreprise, signe sans doute, que les salariés doivent être considérés comme des patients, sujets potentiels à de graves crises existentielles !

Si vous trouvez mes propos légèrement sarcastiques, vous n’avez sans doute pas complètement tort. Bien sûr, je suis comme tout le monde et je pense que l’entreprise doit permettre à chacun de s’épanouir. En revanche, je ne pense pas que ce soit en transformant les managers en assistants de vie que nous retrouverons un niveau d’engagement professionnel supérieur de la part des collaborateurs dans les entreprises.

Je pense même le contraire. Il y a un adage en négociation qui dit : « ce n’est pas à force de donner des steaks à un tigre qu’on le rend végétarien ». Eh bien, il me semble que ce n’est pas en donnant des babyfoots, des salles de siestes et plus de jours de congés à un collaborateur désengagé qu’on le rendra plus engagé.

D’ailleurs, peut-on vraiment « engager » ses salariés ? Peut-on vraiment lutter avec des « Chiefs Happiness Officers » contre l’avalanche de publications qui dépeignent quotidiennement le salariat comme un quasi-esclavage, les patrons comme des bandits de grands chemins et les salariés comme les victimes d’un système qui les broient et qui met en danger leur santé ?

Il y a malheureusement un important narratif négatif qui se propage autour de l’entreprise et qui explique en grande partie, à mon humble avis, les résultats présentés par Gallup.

Alors même si je suis d’accord pour dire que ce qui améliore la qualité de vie professionnelle est forcément positif, je ne pense pas que le commun des managers puisse influer fortement sur l’engagement professionnel d’un collaborateur, l’enthousiasme et la motivation vis-à-vis de son travail. Je ne suis pas sûr qu’on déclenche aussi facilement des décisions profondes pour progresser, ni la volonté de toujours faire de son mieux.

L’engagement professionnel : une décision éminemment personnelle

Je suis vraiment désolé d’insister sur ce point parce que j’aimerais croire le contraire, mais je ne pense pas qu’« engager » dans le sens « engager des salariés » soit un verbe transitif. Tout comme « motiver ». On peut aider, on peut stimuler, on peut peut-être pousser à l’action, mais est-ce qu’on peut vraiment motiver quelqu’un qui ne l’est pas, ça me paraît difficile. Très difficile.

Les grands auteurs sur le sujet de la motivation rappellent que la motivation intrinsèque est quand même beaucoup plus décisive que la motivation extrinsèque. En clair, les stimuli externes peuvent booster, temporairement, mais jamais autant qu’une motivation interne, profonde, personnelle. Si j’ai décidé de considérer le job que vous me proposez comme alimentaire, vous pouvez augmenter la part du télétravail ou m’offrir une meilleure mutuelle, vous aurez du mal à me faire changer d’état d’esprit.

Bien sûr, ma femme sera contente que je lui annonce que la prise en charge de nos lunettes est meilleure, certes. Elle me dira sans doute que c’est une très bonne chose, OK. Mais cette conversation ne se terminera sans doute pas pour autant par l’expression d’une plus grande motivation à prospecter ou à faire les tâches les plus difficiles de mon métier, vous savez, les tâches impopulaires, mais qui sont à la base de tout succès !

Je suis convaincu que ce qui nous pousse vraiment, dans la durée et de façon constante se trouve au fond de nous. Je suis persuadé que les salariés engagés le sont autant, voire davantage pour eux-mêmes, que pour leur entreprise. Les collaborateurs les plus engagés dans leur travail ont compris toutes les vertus de l’engagement, tous les bénéfices personnels qui en découle. Alors, pour les lecteurs sceptiques, voire pour les apôtres du « détachement professionnel », je vous propose de revenir rapidement sur quelques avantages de l’engagement professionnel. Ces quelques idées que les « désengagés » n’ont peut-être pas comprises… pas encore.

  • L’engagement rend la vie professionnelle plus belle
  • L’engagement facilite et booste les progrès
  • L’engagement simplifie la vie professionnelle
  • L’engagement est une forme de générosité
  • L’engagement rend la vie professionnelle plus riche

A ce stade, j’invite les irréductibles qui revendiquent ouvertement leur désengagement et qui ne liront probablement pas tout l’article, à lire au moins le tout dernier paragraphe.

Pour les autres, poursuivons …

5 bénéfices personnels de l’engagement professionnel

L’engagement professionnel rend la vie au travail plus belle

Je ne sais pas pour vous, mais personnellement j’ai toujours pensé que faire les choses avec enthousiasme, quelles qu’elles soient, est quand même beaucoup plus facile et surtout bien plus plaisant que les faire avec des pieds de plomb. Faire les choses avec passion, c’est leur donner une nouvelle dimension et c’est se donner toutes les chances d’y prendre du plaisir… 

L’engagement professionnel pousse à creuser son sujet, à y trouver de nouvelles subtilités. Quels que soient les sujets, l’engagement pousse à faire des choses nouvelles, à changer les itinéraires, à essayer de nouvelles pistes… Et le changement, les nouveautés, la découverte de nouvelles façons de faire, sont de formidables sources de motivation. Être désengagé, considérer notre job comme purement alimentaire, s’efforcer de faire le minimum, ni plus ni moins, c’est aussi se condamner à faire et refaire, encore et encore, la même chose de la même façon. Quelle tristesse !

Dans tous les métiers, on trouve des « victimes » qui pleurent sur leur sort et d’autres qui l’exercent avec passion et s’y épanouissent. Quels que soient les métiers, c’est la façon de le faire qui est déterminante et ceci est d’abord une décision personnelle.

L’engagement professionnel facilite et booste les progrès

L’engagement vis-à-vis de sa mission, de son travail, donne fatalement envie de mieux le maîtriser, de peaufiner son expertise pour l’exercer de mieux en mieux. Si vous lisez l’ouvrage de Térésa Amabile, The Progress Principle, vous découvrirez les résultats d’une formidable étude sur ce qui motive les salariés. Et devinez ce qui arrive en haut de la pile ? Le progrès ! Ou plus exactement le sentiment de progrès. Cette sensation d’avancer, de franchir des caps, de surmonter les difficultés.

Alors bien sûr, nombre de « désengagés » nous diront que c’est le manager qui doit les faire progresser, que c’est l’entreprise qui doit donner du sens à leur vie professionnelle. Certes, ils n’auront pas complètement tort. Mais pour autant, il n’est écrit nulle part que nous ne pouvons pas nous-mêmes prendre notre propre développement en charge.

Jamais, dans toute l’histoire de l’humanité, nous n’avons eu autant de ressources facilement accessibles pour apprendre, renforcer nos compétences, nous développer. Pourquoi diable le développement de nos compétences devrait-il uniquement dépendre de notre management ou des « incitations » à nous développer de notre entreprise ?

Je crois énormément au cercle vertueux qui lie l’engagement aux progrès et à la motivation. C’est une spirale positive sans fin.

Pour l’anecdote, je discutais récemment avec un ami chirurgien. Lui-même se passionne pour les nouvelles technologies qui lui permettent d’aller encore plus loin dans la maîtrise de son art. Il me disait ne pas comprendre ses collègues, de 10 ans ses cadets, qui ne s’y intéressent pas et qui se contentent du savoir-faire qu’ils ont acquis dans leurs études. Comme le disait David Schwartz : ce qui compte n'est pas tellement ce que vous savez quand vous commencez. C'est ce que vous apprenez et mettez en pratique une fois que vous ouvrez les portes.

L’engagement professionnel simplifie la vie au travail

S’engager à fond dans son métier est aussi une façon de se simplifier la vie. Je me souviens d’une discussion avec un collègue, plus âgé que moi à l’époque, quand j’ai commencé ma carrière de consultant. Il m’avait dit : gagner de l’argent n’est pas difficile. Gagner de l’argent sans travailler plus que les autres, ça, c’est difficile.

Alors bien sûr, certains nous diront qu’on peut travailler moins tout en gagnant plus, mais j’ai rarement vu de mes yeux, la mise en œuvre concrète de cette ambition.  Au contraire, j’ai souvent vu des gens au milieu du gué, ne sachant quoi choisir entre tout donner pour leur plan A ou continuer à préparer leur plan B. Le problème des plans B, c’est que ce sont des freins. On a fatalement du mal à s’engager dans son job, quand on pense à l’éventualité de faire autre chose. Les vraies conquêtes, les vraies réussites se font lorsqu’on brûle les bateaux, pas quand on ménage la chèvre et le chou.

J’ai moi-même eu de nombreux entretiens de recrutement avec des candidats « à moitié » et j’avoue que j’ai toujours eu du mal à succomber… C’est sans doute très mal, mais même si je peux tout à fait comprendre que les gens aient d’autres passions dans la vie que leur métier, quand je leur propose un emploi, ce n’est pas pour les avoir « à moitié » engagés.

Mais au-delà de la relation avec son employeur, je suis intimement convaincu qu’il n’y a rien de tel, pour soi-même, que de s’engager à 100% dans ce que l’on fait. Quitte à faire un point de temps en temps et changer de direction le cas échéant.

L’engagement professionnel traduit une forme de générosité

Préférez-vous travailler avec des gens pingres ou avec des gens généreux ? 

Et vos collègues, vos clients, vos managers, pensez-vous qu’ils apprécieront davantage de travailler, de collaborer, d’échanger avec vous si vous être avare ou si vous êtes généreux ?

Eh bien, vous pouvez remplacer généreux par engagés, parce que l’engagement c’est aussi une forme de générosité. Toutes les actions, toutes les missions que vous mettez en œuvre quotidiennement peuvent être faites avec engagement ou de façon désengagée. Et évidemment la perception de vos interlocuteurs sera radicalement différente. Rares sont les gens qui apprécient de travailler avec des gens constamment « en dedans ». On peut le tolérer, on peut s’y résigner, mais ce n’est jamais de gaité de cœur. Donc là encore, c’est un choix, mais c’est un choix qu’il faut être prêt à assumer quand nos relations professionnelles s’en lassent.

L’engagement professionnel rend la vie au travail plus riche

Plus riche au sens figuré, c’est le sens des points précédents, mais aussi au sens propre. S’il y a quelque chose qui a changé dans les relations salariés-entreprises, c’est qu’on ne paie plus aussi facilement « pour voir ». Même les avocats de la « distance », du « détachement », de la priorité au « temps pour soi », devraient pouvoir comprendre qu’on ne peut pas à la fois prétendre à une rémunération confortable tout en étant « désengagé ».

Pour rappel, le « méchant patron » a quelques charges à payer pour faire tourner son entreprise et à chaque fois qu’il verse un salaire, il est normal qu’il puisse s’étrangler quand ceux qui le traitent de pingre sont eux-mêmes très avares de leurs efforts pour contribuer à la réussite de l’entreprise qui les emploie.

En revanche, je connais beaucoup de directeurs commerciaux qui n’ont pas de réticence à bien rémunérer les homo-commercialus qui font leur métier à fond !  Pour rappel, il y a plusieurs dizaines de milliers de postes de commerciaux vacants. Alors, il est facile de comprendre que des commerciaux « engagés » sont attendus les bras ouverts par nombre d’entreprises…

Comment être activement désengagé au quotidien !

J’avoue que je ne sais pas si Gallup utilise encore cette terminologie, mais lorsque je faisais encore régulièrement référence à leurs études dans mes formations au management, l’étude distinguait 3 catégories de salariés selon leurs niveaux d’engagement.

  • Les engagés,
  • Les désengagés
  • Les activement désengagés.

Alors, maintenant, pour terminer cet article, je voudrais m’adresser plus spécifiquement aux « désengagés » par principe, ces personnes qui revendiquent leur droit de voir leur job avec détachement, sans pour autant oser aller au bout des choses…

D’abord, je vous incite à faire preuve d’un peu d’ambition. Pourquoi se contenter d’être désengagé quand on peut être activement désengagé ? C’est quand même plus chic, non ?

Alors, que diable, faites le geste à fond, osez être activement désengagés ! Soyez fiers de votre désengagement professionnel ! C’est l’expression de votre liberté de choix, alors allez au bout de votre logique ! Vous n’en serez que plus admirables.

Et d’ailleurs, pour être parfaitement cohérents avec votre vision du travail et que personne ne puisse jamais vous la reprocher, je vous suggère de ne faire appel qu’à des gens qui partagent votre philosophie vis-à-vis de la vie professionnelle.

Pour cela, rien de plus simple. Il suffit d’un peu de congruence et peut-être d’un peu de courage pour s’entourer de congénères qui vous ressemblent. Laissez-moi vous donner quelques pistes.

  • La prochaine fois que vous confierez votre enfant au maître-nageur, choisissez celui qui passe son temps sur son portable en surveillant d’un œil ce qu’il considère comme une marmaille bruyante sans intérêt.
  • La prochaine fois que vous irez au restaurant, demandez à être servi par le serveur le plus « détaché », celui qui se moque le plus de la satisfaction des clients.
  • La prochaine fois que vous irez aux urgences, exigez d’être soigné par le médecin le plus « activement désengagé » qui soit. Celui qui comme vous, considère son job comme purement alimentaire
  • La prochaine fois que vous vendrez votre maison, prenez le premier agent immobilier qui passe, sans vous préoccuper de son professionnalisme.

Bon, je pense que vous avez compris l’idée, je vous laisse poursuivre la liste vous-même.  Si vous vous en donnez la peine, vous trouverez tout au long de votre vie et à chaque fois que vous aurez besoin d’aide, des gens « désengagés » voire « activement désengagés » pour vous accompagner.

Vous allez voir, c’est top !

Pour les autres, je vous suggère vous aussi d’être cohérent avec ce qui fait la beauté d’une carrière professionnelle en pensant au grand Arthur Ashe qui disait : Quoi que tu fasses, fais-le à fond, ou renonces-y !

Allez, bon business à tous !

© Copyright : Lève-toi et vends ! / Nicolas Caron

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2 réflexions sur “Engagement professionnel : avez-vous vraiment besoin d’un Chief Happiness Officer ?”

  1. Bonjour Nicolas,
    Je vous avoue que j’ai eu peur en lisant les premières lignes de votre article, l’engagement étant pour moi une vertu cardinale dans l’entreprise. Et puis, une fois de plus, vous avez éclairé avec beaucoup de justesse le thème que vous abordez. Pour faire simple et dépasser légèrement le cadre du sujet, je dirais que tant que l’on exerce un métier pour de mauvaises raisons, il n’y aura pas d’engagement possible, et l’on cherchera à l’extérieur tous les adjuvants que l’on estime nécessaires pour espérer se sentir mieux. Malheureusement cela ne règle rien (ce serait trop simple). Le grand sujet est « d’aimer ce que l’on fait ». C’est là que se situe la motivation intrinsèque, et donc l’engagement (et plein d’autres choses aussi). Le métier que quelqu’un exerce ne m’intéresse pas tant que ça, en revanche le « pourquoi » et le « comment » (parfois l’un sans l’autre) en disent beaucoup sur le niveau d’engagement de la personne. Et puisque que comme vous, mon sujet c’est les vendeurs, c’est une bonne base pour commencer à travailler pour un avenir commun plus ensoleillé.

    Au plaisir de vous lire;

    FRANCK TIRELLI
    lebosko.fr
    « Apprendre à vouloir »

    1. Nicolas Caron

      Merci pour votre commentaire. Je rajouterai que parfois, on finit par aimer ce qu’on fait parce qu’on s’engage à fond dans sa mission.
      Sur le reste nous sommes ne phase.

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